Crise sanitaire : quelles leçons à tirer ?

            Depuis à peu près une année maintenant que nous sommes plongés dans cette crise sanitaire, une crise qui ne semble pas devoir disparaître de sitôt, la seule nouvelle intéressante de ces dernières semaines est que le gouvernement, refusant de suivre les pontes de la médecine, de la grande majorité d’entre eux tout au moins, n’a pas procédé à un troisième confinement.
            Pari risqué puisque les statistiques du nombre d’hospitalisations et de malades en réanimation (critères déterminants) plafonnent à un niveau élevé sans toutefois amorcer un « décollage » comme le prédisaient nos mandarins, et qu’elles auraient même tendance à diminuer très légèrement depuis une semaine.
            Qu’en sera-t-il dans une quinzaine, un mois, six mois ? Personne ne le sait. Croisons simplement les doigts pour que nos politiques aient pris la bonne décision, à vrai dire la seule qui s’imposait au moment où ils l’ont prise !
            Est-il possible d’ores et déjà de tirer quelques leçons de cette crise sanitaire sans précédent ? Amorçons quelques pistes.
            Que cette pandémie qui a déjà fait plusieurs millions de morts à l’échelle de la planète et plus de 80000 chez nous, n’est pas une simple grippette comme certains l’ont dit imprudemment au début (et moi le premier), et que dans la façon de se reproduire et de se propager, ce virus présente bien des aspects déconcertants y compris pour nos éminents épidémiologistes.
            Que le confinement pratiqué par les Etats ne peut être qu’une solution à court terme destinée à soulager les services hospitaliers submergés par le nombre d’entrants. En aucun cas, il ne saurait tenir lieu de politique sanitaire compte tenu des graves dégâts économiques, sociaux, psychologiques en tous genres qu’il occasionne et dont on n’a pas fini de mesurer les effets directs et indirects.
            Qu’il va falloir s’habituer à vivre et à vivre le plus normalement possible avec ce ou plutôt ces coronavirus, ce qui implique que chaque pays soit suffisamment et durablement équipé en masques, tests et centres de vaccination…, mais aussi qu’il accroisse substantiellement le nombre de ses lits hospitaliers et/ou en inventant des formes plus souples et moins coûteuses d’hospitalisation à domicile.
            Qu’il va falloir quant à nous Français nous poser sérieusement la question de la déficience de nos instituts de recherche autrefois en pointe dans les domaines de l’immunologie, de leur incapacité à trouver et à produire dans l’urgence un vaccin adéquat. N’y a-t-il pas là un problème plus général qui tient à la place de la recherche en France ? A l’absence de risque et de prise de risque de notre ministère public, de nos laboratoires et de nos chercheurs ? A ce désastreux principe de précaution (qui s’est substitué à celui de prévention) qu’on a cru bon d’inscrire il y a quelques années dans notre Constitution ? Prévention/précaution, ce n’est tout de même pas la même chose !

Une crise sanitaire révélatrice de notre fragilité mais aussi de notre génie

            Décidément, dans cette histoire de coronavirus, rien ne se passe comme prévu. Après les épisodes d’un premier puis d’un second confinement, assez bien acceptés dans l’ensemble, on croyait en ce début de l’année 2021 que le plus dur était passé. Plus récemment, la mise en place d’un couvre-feu dans les régions les plus touchées puis son extension à l’ensemble du territoire métropolitain pouvaient passer comme un compromis astucieux entre les deux exigences sanitaire et économique qui allait, dans l’attente d’une vaccination de masse, enrayer définitivement la pandémie.
            Hélas, il n’en est rien. En cette fin du mois de janvier, non seulement la perspective d’un troisième confinement est en passe de devenir réalité mais la stratégie de vaccination rencontre un peu partout des problèmes de logistique et d’approvisionnements inattendus de nature à prolonger la crise sanitaire de plusieurs semaines voire de plusieurs mois. Sans parler de l’irruption de ces variants anglais, sud-africain et brésilien du virus qui jettent des doutes sur l’efficacité même du vaccin.
            A quand le retour au bon vieux temps ? A ce monde d’avant où l’on se côtoyait et s’embrassait à tout bout de champ, où l’on pouvait aller et venir sans masque, sans test, sans crainte du couvre-feu, sans attestation d’aucune sorte… Qu’est-il devenu ce « vert paradis » ? Est-il remis aux calendes grecques ?
            C’est d’autant plus angoissant qu’à cette incertitude s’ajoute quelque chose de plus profond, quelque chose qui touche à la prise de conscience de notre fragilité en tant qu’être humain, de notre vulnérabilité devant la maladie et devant la mort. Oui, cette mort dont nous avions pris l’habitude de ne pas parler, que nous avions rejetée dans les oubliettes de notre cerveau et qui nous revient en pleine face comme pour nous narguer et nous rappeler, si besoin en était, que notre vie ne tient à pas grand-chose, à un minuscule virus de rien du tout. Oui, dans cette histoire de coronavirus, l’homme (et la femme) et plus encore l’homme (et la femme) occidental, parce qu’il est le plus enclin à se croire maître et dominateur de la nature, en a pris un sacré coup. Il a singulièrement perdu de sa superbe.
            Mais en rester là serait nourrir inutilement le cycle des angoisses et des effets délétères sur nos comportements et nos états d’âme. Cette pandémie, plus qu’aucune autre, a été aussi le révélateur de notre capacité à réagir individuellement et collectivement face à un virus dont personne ne pouvait soupçonner la virulence. La mise en place de mesures prophylactiques destinées dans un premier temps à s’en protéger, les progrès accomplis au fil des mois par nos services hospitaliers dans la prise en charge des malades, l’intervention souvent massive des Etats pour venir en aide aux entreprises en difficulté et à leur personnel, et enfin la découverte en un temps record de vaccins susceptibles d’enrayer définitivement l’épidémie, tout cela est à mettre à l’actif du génie humain, de l’inventivité de ses chercheurs, de l’ingéniosité de ses logisticiens, du dévouement inlassable de ses soignants, sans parler de la remarquable acceptabilité des peuples face aux mesures de coercition qu’on leur imposait et dont ils ne comprenaient pas toujours le sens.
            A défaut des souffrances qu’elle nous aura causées au moins peut-on espérer que cette crise sanitaire nous aura appris quelque chose sur les autres et sur nous-même.

Un Noël mémorable : celui de 1944

            Tous les sondages le prouvent, les Français comptent parmi les peuples les plus pessimistes au monde. Ils ont beau être parmi les plus protégés, les mieux soignés, les plus aidés face aux aléas de la vie (on l’a vu durant cette crise du Covid 19), ils n’ont pas le moral. Ils ne cessent de broyer du noir et de tenir des propos amers qui font sourire les étrangers : « Vous autres Français, vous êtes heureux et vous ne le savez pas ! » me disait un jour un Canadien !
            Mais il n’en a pas toujours été ainsi. L’histoire nous apprend que les Français, il n’y a pas si longtemps encore, étaient perçus comme un peuple enjoué, gai, volontiers blagueur et un tantinet persifleur. Me revient en mémoire le Noël 1944, celui que j’ai vécu dans mon petit village de la région parisienne, le premier dont je me souvienne avec quelque précision.
            La situation du pays n’était guère brillante. Le territoire (excepté quelques poches de résistance sur la côte atlantique) venait d’être libéré mais la guerre était loin d’être finie et des milliers de soldats continuaient de tomber sur les champs de bataille d’Outre Rhin. Quant à l’état économique, social et sanitaire, il était tout simplement catastrophique. Nombre de villes, par quartiers entiers, avaient été détruites, sans parler des routes, des ponts et des voies ferrées coupées, des réseaux d’eau et d’électricité gravement endommagés. Tout était à reconstruire. Et puis surtout, les Français avaient faim. Ils manquaient de tout : le beurre, le sucre, l’huile la farine et les pommes de terre faisaient cruellement défaut, tout comme le charbon pour se chauffer.
            Eh bien malgré cela, malgré un pays en ruine, malgré les restrictions de toutes sortes qu’ils devaient endurer, malgré les tickets d’alimentation et les étals de magasin désespérément vides, les Français avaient la pêche. Ils étaient heureux. Après quatre années d’une terrible et humiliante occupation, ils revivaient. Et en ce Noël 44, et malgré les difficultés de l’heure, ils ne se privèrent pas de le manifester. Ceux de ma génération s’en souviennent sûrement.
            Dans notre village, presque chaque famille eut à cœur ce jour-là d’accueillir quelques-uns de leurs proches : oncles, tantes, cousins, cousines ou vagues amis, tous venus de Paris ou de sa proche banlieue. Et pourquoi ceux-là ? Parce qu’ils avaient plus que d’autres pensait-on (et avec juste raison), en tout cas plus que nous-autres gens de la campagne, souffert des multiples privations et des contraintes exercées par l’Occupant.
            Certes, en ce Noël 44, la plupart des enfants durent se contenter d’une simple et grosse orange en guise de cadeau. Mais c’était « l’orange du Père Noël » et elle suffit amplement à leur bonheur. Quant aux adultes, s’ils ne trouvèrent pas dans leur assiette ce qu’on attend aujourd’hui d’un vrai repas de Noël, ils purent néanmoins et pour la première fois depuis bien longtemps manger à leur faim. Et cela on s’en doute dans une ambiance des plus chaleureuses et aussi des plus enfumées. Si je me souviens bien, chacun y alla de sa chansonnette et de ses histoires à dormir debout jusqu’à ce que les uns et les autres éprouvent le besoin de prendre l’air et de sortir dans les rues du village où ils se joignirent à d’autres invités en vadrouille. Et la fête se termina à une heure avancée de la nuit par un défilé impromptu rythmé par une marseillaise tonitruante suivie curieusement par un majestueux et inénarrable « Minuit Chrétien, que certains avaient chanté la veille à la messe de minuit. Oui, un Noël mémorable que celui de cette année 1944 !

Elections nord-américaines : premières leçons d’un scrutin

Que peut-on d’ores et déjà retenir de ces élections nord-américaines pour lesquelles le monde entier et les Français en particulier se sont passionnés ces dernières semaines:

  1. Que depuis les années 1960, les Américains n’ont jamais autant voté pour des élections présidentielles (environ 63% des inscrits contre 50 à 55% habituellement), ce qui chez nous serait un faible pourcentage (78% des inscrits en 2017 au premier tour et encore près de 75% au deuxième tour).
  2. que les sondages qui donnaient Donald Trump largement battu, a mieux résisté que prévu, même si au final il est devancé d’environ 5 millions de voix par son adversaire Joe Biden.
  3. que le trumpisme, ce populo-nationalisme ou nationalo-populisme, contraire sur bien des points à la doctrine même du Parti républicain dont Trump s’est fait pourtant le porte-drapeau, est suffisamment bien ancré dans l’électorat américain pour lui survivre, même si celui-ci, par son charisme, l’a profondément marqué de son empreinte (il n’est pas impossible qu’il veuille se représenter dans quatre ans !)
  4. que le trumpisme est moins la cause que le symptôme d’une Amérique en perte de vitesse sur les plans économique et culturel même si elle demeure, ne l’enterrons pas trop vite, la première puissance mondiale sur les plans financier, militaire et commercial (sur les ondes, j’ai entendu dire que les USA au lendemain de la Seconde guerre mondiale représentaient 22% du commerce mondial contre seulement 11% aujourd’hui).
  5. que le système électoral américain basé sur le vote indirect apparaît singulièrement désuet et que les Américains auraient tout intérêt à se mettre d’accord pour le transformer (est-il normal par exemple que Donald Trump en 2016 ait battu Hillary Clinton en nombre de grands électeurs alors que cette dernière le devançait de 3 millions de voix à l’échelle du pays ?
  6. que les erreurs des instituts de sondage nord-américains (ils se sont une fois de plus lourdement trompés) devraient inciter leurs dirigeants (pourtant issus des  prestigieuses universités américaines dont on nous rebat les oreilles), à plus de modestie et à prendre exemple sur nos écoles universitaires injustement mal cotées dans les classements internationaux.

Fallait-il montrer les caricatures de Mahomet ?

            Enseigner est un art bien difficile mais qu’il puisse être dangereux au point de conduire au meurtre, cela nul ne pouvait l’imaginer avant ce vendredi noir qui restera à jamais marqué dans nos mémoires.
            J’ai enseigné, il y a bien longtemps de cela, dans les classes de même niveau que celles dont M. Samuel Paty avait la charge. Que cet enseignant soit mort dans les conditions que l’on sait est innommable. Et il est mort, d’après ce que l’on nous a dit, dans le cadre du programme national d’éducation morale et civique portant sur la liberté d’expression.
            Et l’ancien enseignant que je suis de se poser la question : qu’aurais-je fait à sa place ? Comment m’y serais-je pris pour inculquer à mes élèves que la liberté d’expression dans notre France républicaine ne se discute pas, qu’elle est sans limite et totale, que les images et caricatures véhiculées par tel ou tel média, quand bien même elles viendraient à me choquer et me blesser au plus profond de mon être, sont autorisées par la loi et que, s’il est possible de m’en indigner et même de crier mon indignation, je ne pourrais en exiger leur interdiction ? La liberté d’expression est une composante de La liberté tout court, notre bien commun à tous.
            Mais aurais-je été, comme l’a fait ce courageux professeur, jusqu’à prendre le risque de montrer les caricatures de Mahomet, celles publiées notamment dans Charlie Hebdo, je ne le crois pas. A coup sûr, je n’aurais pas esquivé le sujet. J’en aurais parlé et tenté d’instaurer un débat avec les élèves mais de là à passer des paroles aux actes et à exhiber ces caricatures-là, précisément celles-ci, je ne le pense pas, tout au moins dans le contexte actuel.
            J’entends les critiques ou plutôt la critique : en agissant ainsi vous vous autocensurez et vous donnez raison à vos opposants, à ceux qui ne veulent pas reconnaître les lois de la république. En quelque sorte, vous vous mettez en contradiction avec les principes mêmes que vous voulez défendre.
            L’argument est recevable. Sauf que l’enseignant se doit de choisir la méthode la plus appropriée pour arriver à son but qui est, ne l’oublions jamais, de transmettre des connaissances et d’amener ses élèves par touches successives à une plus grande ouverture d’esprit et à un niveau de discernement supérieur à celui qu’ils ont pu hériter de leur entourage familial. Et sur un sujet aussi délicat que celui de la caricature, est-il bien nécessaire au professeur d’appuyer sa démonstration sur des dessins à caractère religieux dont on sait qu’ils sont, plus que d’autres, de nature à heurter les consciences et à affecter le climat de confiance et de respect mutuel au sein de la classe ? Sans rien céder sur le fond, l’enseignant n’est-il pas amené à adapter sa pédagogie à son auditoire, et de l’adapter non pas (ou pas seulement) par crainte ou peur des réactions éventuelles des parents d’élèves mais bien par simple souci d’efficacité et dans un esprit de responsabilité par rapport à ses élèves, ses collègues et plus largement par rapport à son entourage ? C’est la question que je pose.

Contournement de Beynac : et pourquoi pas un référendum ?

            Revenons une fois de plus sur cette affaire du contournement de Beynac. Elle n’a que trop défrayé la chronique ces dernières années. Et les nombreux vacanciers qui traversent en ce moment notre région n’en reviennent pas de cette situation ubuesque d’un chantier à moitié sorti de terre, de moignons de piles et de tabliers enferraillés, abandonnés à leur triste sort, sans perspective d’achèvement à court terme.
            Il faut qu’on en finisse une fois pour toute. Et de la meilleure façon qui soit : en terminant au plus vite le chantier. Cela, dans l’intérêt de tous : résidents, touristes et contribuables qui ne comprendraient pas qu’après avoir dépensé quinze à vingt millions d’euros pour effectuer les travaux, en dépenseraient autant, si ce n’est plus, pour les démolir et revenir à l’état initial. Une absurdité, d’autant que, ne l’oublions pas, l’Etat dans un premier temps, avait donné son feu vert à ce projet. Un projet, répétons-le, devenu nécessaire compte tenu des nuisances et des dangers de toutes sortes encourus par la traversée de ce village à flanc de falaise et qui, contrairement à ce qu’on a pu écrire ici et là, a été conçu dans les moindres détails pour s’intégrer parfaitement dans le paysage.
            Tout cela est insensé. Et toutes les décisions administratives et judiciaires de ces derniers mois ne me convaincront pas de la justesse des arguments invoqués pour revenir en arrière, au statu quo ante. Celles-ci, c’est une évidence, résultent de l’action d’une poignée de notables bien placées en haut lieu et non de l’assentiment des élus, maires, conseillers départements et régionaux qui, dans leur très grande majorité, se sont prononcés clairement et sans ambiguïté pour l’achèvement des travaux.
            Les Périgourdins ne sont pas de nature à se laisser faire. Si le nouveau gouvernement se dit proche des territoires et sensibilisé aux questions environnementales, il doit et dans les meilleurs délais, régler cet épineux problème du contournement de Beynac, si besoin en faisant appel au peuple, en organisant un référendum. Un référendum à l’échelle départementale : pourquoi pas ? Ce n’est tout de même pas les intérêts de quelques-uns qui doivent primer sur l’intérêt général !

Etrange printemps

            L’étrange printemps que nous aurons vécu. Il sera à marquer d’une croix blanche ! Qui aurait imaginé une telle situation il y a un an, il y a seulement six mois ? Personne. Absolument personne. Pas même nos astrologues distingués !
            A l’origine, une pandémie dont on se rendra compte plus tard (dans un ou deux ans peut-être) qu’elle n’aura été ni plus ni moins qu’une grippe sans doute un peu plus virulente que les autres mais une grippe qui, par son caractère aussi inattendu qu’insaisissable, va mettre les sommités de nos grands organismes sanitaires en émoi.
            C’est à partir de là, de cette méconnaissance que le monde médical avait de ce virus et de ses effets imprévisibles sur le corps humain que tout s’est déclenché. Que la panique a gagné nos gouvernants qui, prenant subitement conscience de l’état de sous-équipement dans lequel se trouvait leur système hospitalier pour l’affronter, ont tergiversé sur la marche à suivre et perdu les pédales quant au discours à tenir devant leurs ressortissants (la vérité étant difficile à dire surtout quand certains sont aux aguets pour en tirer un profit politique !)
            Des hésitations et déclarations contradictoires qui, à leur tour, ont alimenté un climat de peur que la décision de confinement prise au plus haut sommet de l’Etat (d’un Etat déclaré chez nous en état de guerre), va définitivement installer et amplifier. Il n’est donc pas étonnant que le confinement ait été dans l’ensemble bien accepté par les Français, ces soi-disant râleurs professionnels et rebelles à l’ordre public. Toutes les conditions étaient réunies pour qu’ils l’acceptassent.
            Un confinement strictement appliqué et généralement bien suivi mais dont il va falloir à présent assumer toutes les conséquences car ayant conduit à un arrêt presque total des activités du pays durant quasiment un trimestre, on peut s’attendre à des répercussions économiques et sociales des plus désastreuses dans les mois qui viennent en termes de faillites d’entreprises, de hausse du chômage, de baisse du pouvoir d’achat et, par un effet boule neige, de chute drastique des recettes fiscales. Bref, un appauvrissement général du pays, accompagné d’un colossal surplus d’endettement, d’ailleurs mal mesuré par les économistes (l’économie n’étant pas une science exacte), dont le pays mettra sans doute plusieurs années à s’en remettre.
            D’où la question qu’il faudra bien à un moment donné se poser, calmement, si possible sans passion et en dehors de tout parti pris politique ou autre : fallait-il imposer un tel confinement pour en arriver là, à cette situation d’affaissement et de désorganisation de tout un pays ? N’y avait-il pas d’autres solutions alternatives ? Le débat est d’ores et déjà lancé il n’est pas près de s’arrêter !
            Mais le curieux et troublant printemps 2020 ne s’arrête pas là. Peut-être même que ce qui se passe en ce moment dans nos villes n’est que la suite logique de ce confinement. Je veux parler de l’extraordinaire embrasement d’une partie de la jeunesse mondiale à propos d’un fait divers survenu loin de nos frontières : la grave et inexcusable bavure policière survenue aux Etats-Unis d’Amérique. En temps ordinaire, l’affaire n’eût sans doute pas dépassé le cadre de l’Etat du Minnesota où il a eu lieu mais là, dans le contexte politique particulier de cette Amérique trumpiste, elle a révélé l’ampleur de la ségrégation raciale dont continuent d’être victimes les Afro-américains de ce pays d’outre-Atlantique.
            Et un fait divers en appelant un autre, c’est en France cette fois-ci que la mort d’un homme de couleur, dans des conditions mal élucidées et il y a plus de quatre ans de cela, refait surface. Il est vrai que l’occasion était trop bonne pour certains partis et organisations bien identifiées sur l’échiquier politique, pour faire de cet homme, en dépit de son passé pas très reluisant, le symbole de toutes les violences à caractère raciste que les forces de l’ordre se rendraient coupables et plus largement encore celui des injustices et des discriminations en tout genre dont ces jeunes des quartiers périphériques sont effectivement les victimes.
            Le printemps 2020 s’achève. Que nous réserve cet été et plus encore cet automne ?

Pour un souffle nouveau

On aura tout vu, tout entendu durant ces deux mois de confinement : des experts en ceci en cela venir sur les plateaux de télé et prédire le meilleur et le pire, des spécialistes du « il faut que », « il faut qu’on », des procureurs-politiciens ou des politiciens-procureurs qui affûtent leurs arguments et s’apprêtent à livrer leur bataille de l’après-crise coronavirus.

Nicolas Hulot n’est pas de ce genre. C’est un homme posé, réfléchi, positif. Il n’est pas dans l’invective. Il vient de nous présenter sur les ondes son plan d’action pour sortir du bourbier actuel et proposer aux Français de profiter de ce moment tout à fait inédit dans notre histoire pour réorienter notre système économico-financier défaillant vers un autre plus écologique, plus sobre, moins gaspilleur d’énergie, un système plus humain puisque l’un de ses objectifs serait de répartir plus justement les richesses produites aux différentes échelles internationale, européenne, nationale.

Vaste programme aurait dit en son temps le général de Gaulle !  Nonobstant cet aspect conceptuel et quelque peu idéaliste, on ne peut que louer un tel effort intellectuel et se dire après tout pourquoi pas ? La crise pandémique n’a-t-elle pas montré les limites de la mondialisation, du libre-échange et de la concurrence non faussée ? N’a-t-elle pas donné plus de crédit aux frontières, celles de l’Europe mais aussi, il faut bien le dire, celles de nos propres frontières nationales ? Le temps n’est-il pas venu de revoir le plan d’aménagement de notre territoire, de rééquiper notre pays en ses industries de base (notamment sanitaires), celles qui nous sont immédiatement indispensables en cas d’urgence ? De revaloriser l’artisanat, le commerce de proximité, de tirer un meilleur parti de la diversité de nos territoires agricoles, forestiers, maritimes ? D’appliquer le principe de subsidiarité à tous les échelons de la société ?

Après tout, la crise a eu au moins le mérite d’activer les prises de conscience et d’ouvrir des fenêtres sur des avancées sociales et écologiques qui seraient passées comme parfaitement utopiques voire fantaisistes il n’y a pas si longtemps.

Demeure la question principale : celle du comment y parvenir ? De comment mettre en œuvre un programme qui vise ni plus ni moins qu’à changer de cadre social et civilisationnel ? Avec quels hommes ? Quels partis ? Quelles institutions ? Quelle Europe ? Avec quelle gouvernance ? C’est là que le bât blesse.

On a bien fait remarquer à Nicolas Hulot que s’il avait de bonnes idées, il avait plus de difficultés à les mettre en œuvre et qu’en quittant précipitamment le bateau gouvernemental, il n’avait pas donné une bonne image de ce que doit être le courage politique, celui de la persévérance dans l’effort, y compris dans les moments difficiles quand on se sent mal ou insuffisamment compris.

S’il semble difficile à l’heure qu’il est d’entrevoir quelques pistes de sortie de crise, l’une au moins est à rejeter catégoriquement, celle qui consisterait à retomber dans nos petits combats de politique politicienne, d’opposition systématique au gouvernement en place, de batailles à coups de milliers d’amendements qui ne mènent à rien sinon qu’à susciter la méfiance des Français envers leur classe politique.

Une des pistes qui me semble les plus prometteuses d’avenir serait pour le président Macron de proposer, dans une sorte d’union nationale, de rassembler et pour une durée limitée (disons jusqu’à la prochaine présidentielle) toutes les forces vives du pays, de la gauche à la droite (partis, associations, agents économiques, associatifs, culturels, simples citoyens…), afin de jeter les bases d’un vaste et audacieux plan de redressement impliquant quelques mots ou phrases-clefs : subsidiarité, aménagement, proximité, solidarité, relocalisation, participation… Un plan pour redonner confiance aux Français. Confiance entre gouvernants et gouvernés, entre élus et non élus, entre citoyens d’une même nation. Confiance pour sortir de l’ornière et donner un nouvel élan, un souffle nouveau au pays.

Coronavirus : on en perd son latin

Chers amis de France et de Navarre, avouez tout de même qu’on vit une drôle d’époque ! Plus on avance dans cette histoire de coronavirus, plus on y perd son latin.
Le confinement est devenu en quelques jours, le maître mot de l’actualité. On ne parle que de ça. Ah la belle trouvaille ! Outre le fait qu’il porte atteinte aux libertés fondamentales, on peut se demander s’il va servir à quelque chose. La réponse est connue : il va nous protéger dans l’immédiat des risques de contagion, en particulier les vieux schnoques dont je fais partie, de freiner la contamination et ce faisant d’éviter l’engorgement des hôpitaux malheureusement et/ou scandaleusement sous-équipés et déjà surchargés en certaines régions du pays.
Cela, on l’a bien compris. Mais si, comme on nous le dit sur tous les tons, il est nécessaire qu’au moins 50% d’une population soient immunisés pour que le virus disparaisse de lui-même, il faut bien admettre que le confinement, en empêchant l’immunisation naturelle des sujets, a aussi pour effet de retarder la sortie de crise.
C’est là le piège et le nœud du problème. Plus le confinement se prolonge, moins on a des chances de sortir rapidement de la crise sanitaire et moins on sort rapidement de la crise plus la tempête économique et sociale qui s’annonce à l’horizon risque de prendre des proportions que je n’ose imaginer ce soir.
Voilà le dilemme que je soumets à votre réflexion. Le confinement n’est qu’un pis-aller à la crise. Un pis-aller un peu bancal avouons-le ! Sans doute va-t-il permettre de sauver quelques dizaines de milliers de décès (on en est à environ 100 000 en ce 11 avril à l’échelle mondiale), ce qui est peu finalement par rapport à d’autres pandémies dont on parle beaucoup moins, mais il va à coup sûr générer des dommages collatéraux en termes de faillites d’entreprises, de mise au chômage de milliers de salariés et finalement de décès directs ou indirects dont on a peine aujourd’hui à mesurer l’ampleur mais qui seront probablement plus importants que ceux résultant de l’épidémie elle-même.
Eh bien, devant cette situation inédite, je vais peut-être vous surprendre mais je demeure un indécrottable optimiste. Nous autres êtres humains sommes embarqués sur un bateau qui, ayant choisi une voie audacieuse et inconnue, est aux prises à une mer déchaînée avec les deux monstres de Charybde et de Scylla qui nous font face et que nous devons vaincre à tout prix. Nous tanguons de tribord à bâbord, le roulis est fort mais nous tenons bon. Bientôt, devant notre bateau s’ouvrira une mer plus apaisée. Il ne peut en être autrement. Sur une autre mer, c’est-à-dire un autre monde. Oui, regardez bien, cet autre monde, il se dessine déjà, on en parle à demi-mots : relocalisation, souveraineté sanitaire, resserrement des liens, plus de proximité, plus de fraternité. Autrement dit, un monde plus humain mais un monde encore à construire.
Allez chers amis, malgré le confinement et en dépit de tout, je vous souhaite de joyeuses Pâques.

De cette pandémie faisons en sorte qu’il en sorte le meilleur pour chacun d’entre nous !

Eh oui, personne ne l’avait vue venir cette pandémie ! Pas un seul pays, pas un seul gouvernement, pas un seul médecin, pas un seul chercheur, pas un seul dirigeant politique. Et quand ils l’ont vu venir, ils n’en ont pas mesuré la gravité et l’ampleur ! Ils ont tergiversé, ils n’ont pas pris les mesures adéquates. Ils ont commis des erreurs. C’est un fait. Or la politique, par définition, c’est prévoir. Donc le gouvernement, tous les gouvernements de la planète n’ont pas su anticiper, ils sont donc tous responsables, à des degrés divers, de ce qui nous arrive.

Une fois qu’on a dit cela, que peut-on dire de plus ! Tout simplement qu’ils (les politiques) ne pouvaient faire autrement que de tergiverser. Décider d’arrêter un pays, prendre le risque de mettre des milliers d’entreprises en faillite, de fermer les frontières, d’équiper les hôpitaux et d’acquérir en quelques jours des millions de masques, de respirateurs etc., ce sont des décisions graves, extrêmement graves, qui ne se prennent pas à la légère. On comprend, sans pour autant excuser, les hésitations et les maladresses des gouvernements, du nôtre comme des autres.

Il faut se faire à l’idée que nos dirigeants politiques, dans le monde complexe qui est le nôtre et malgré les formidables outils d’information dont nous disposons, sont amenés à faire des choix et à prendre des décisions sans avoir une vue parfaitement claire du chemin sur lequel ils engagent leur pays. Ils ne l’auront jamais.

Eh oui ! Le monde ne cheminera jamais d’une façon parfaitement ordonnée, sans soubresauts, sans faits inattendus susceptibles de venir modifier sa trajectoire. Et c’est heureux qu’il en soit ainsi ! Rien n’est tracé à l’avance ! On le sait, l’histoire humaine, depuis des millénaires, ne se construit qu’à petits pas, au prix de brillantes réussites (scientifiques, technologiques, économiques, sociales…) mais aussi de terribles échecs (guerres et de ce qu’il en résulte).

Cette pandémie n’est pas autre chose que le révélateur de nos insuffisances : insuffisances en matière de connaissances épidémiologiques mais aussi dans la manière de nous organiser pour y faire face collectivement.

La seule chose qui importe désormais sera, le moment venu (et il n’est pas encore venu), de tirer toutes les conséquences de cette pandémie pour qu’il en sorte un monde un peu plus prévoyant et un peu moins imparfait, tout en sachant qu’il y aura d’autres calamités (sanitaires ? cosmiques ? économiques ? financières …?), toutes aussi extraordinaires et inattendues que celle-ci, qui nous feront prendre conscience d’autres insuffisances que nous ne soupçonnons pas aujourd’hui.

Oui, de cette pandémie, il peut et il doit en sortir du meilleur pour chacun d’entre nous, c’est l’exigence que l’on doit avoir en ce début du mois d’avril !