Hommes et femmes : égalité mais non identité

            Nous sommes égaux hommes et femmes. Ce qui ne l’était pas autrefois, il n’y a pas si longtemps, l’est à présent et cela est évidemment une bonne chose. A tel point que l’on se dit : comment a-t-on pu attendre si longtemps pour reconnaître à la femme toute la place qu’elle mérite ? Comment se fait-il qu’en France par exemple, on ne lui ait accordé le droit de vote que si tardivement ? C’est si vrai qu’on est choqué devant le sort qui lui est réservé dans nombre de pays du monde où elle est trop souvent considérée comme une citoyenne mineure, de seconde zone, voire une esclave……. cela nous semble incongru.

            Ce qui ne veut pas dire que sur le plan pratique tout soit réglé, loin s’en faut. Sans parler des formes d’asservissement qu’elles vivent dans nombre de pays du monde, il existe encore bien des progrès à faire en matière d’émancipation de la femme y compris dans nos pays développés.

            Mais si la recherche d’égale dignité de chaque sexe est légitime, cette égalité ne signifie pas identité entre hommes et femmes et encore moins domination inversée (de la femme sur l’homme) ou rôles indifférenciés entre hommes et femmes. Car si la femme égale l’homme en droit, cela est entendu une fois pour toutes, elle ne lui est pas identique. Egales mais non identiques. On l’oublie trop souvent.

            Autrement dit, si la femme ne doit pas se laisser déterminer par son sexe, elle ne peut pas faire comme si l’appartenance à l’un ou l’autre sexe n’avait aucun sens. Si nous sommes égaux nous n’en sommes pas moins différents. Hommes et femmes ne sont pas interchangeables. Chaque sexe a quelque chose de différent qui attire et s’inscrit dans la complémentarité de l’autre.

            On peut espérer par exemple qu’il y a une façon féminine de faire de la politique, de diriger une entreprise, de conduire un orchestre, de composer une musique, d’être une sportive de haut niveau… Chaque sexe a sa richesse et sa spécificité. Que serait la vie du couple s’il n’y avait cette altérité, source d’attirance mutuelle entre l’homme et la femme ? Et que dire du rôle déterminant des parents, homme et femme, dans la structuration de l’enfant ? Les rôles dans le couple ne seront jamais équivalents ou identiques.

            On ne le dira jamais assez, chaque sexe a besoin de se connaître et à connaître l’autre, à comprendre et à aimer la nature de l’autre dans le respect de son identité.

Le compromis, une autre manière de faire de la politique

            Quel bilan peut-on tirer de ces deux tours d’élections législatives ?

            D’abord cette chose étonnante et inédite, qu’en dépit d’une forme de scrutin qui ne s’y prête guère (le scrutin majoritaire si honni de certains !), toutes les familles politiques seront assez bien représentées au sein de la nouvelle assemblée.

            Quatre blocs d’importance inégale vont en effet se partager l’hémicycle.

            D’une part, un bloc du Centre (droit et gauche), encore très largement majoritaire (246 sièges) mais pas au point d’accéder à la fameuse barre des 289 sièges qui lui donnerait la majorité absolue. Un échec évident pour le président mais pas au point de lui ôter sa légitimité comme je l’ai entendu dire de quelques commentateurs.
            Puis un bloc de gauche (Nupes) regroupant en une alliance inédite : Insoumis, Ecologistes, Socialistes, Communistes. S’il enregistre une belle percée (142 sièges), son succès reste en demi-teinte et demeure loin, très loin, des ambitions de son leader de se voir choisi comme Premier ministre et de gouverner le pays.
            Arrive ensuite le parti d’extrême droite (RN). C’est le seul vrai vainqueur de ce scrutin puisqu’il multiplie par 10 le nombre de ses élus. Mais avec ses 89 députés, on voit mal comment il pourrait à lui seul imposer ses vues à l’Exécutif.
            Reste le parti de la droite classique (LR-UDI) que l’on croyait en voie de disparition après le piètre score de sa candidate à la présidentielle mais qui, bien qu’en net recul, se maintient à un niveau tel (64 pièges) que certains le voient jouer le rôle de force d’appoint de la majorité.

            Au regard de ces résultats, nombre d’observateurs arrivent à la conclusion peu réjouissante qu’une telle assemblée, révélatrice des profondes fractures qui traversent notre pays, est vouée à l’inaction et à sa dissolution à plus ou moins brève échéance ; ça ne peut pas marcher disent-ils compte tenu des oppositions radicales et divergentes qui vont s’y manifester. C’est la cacophonie assurée quel que soit le gouvernement en place !

            Pourtant, à y regarder de près, une telle configuration n’est que l’expression de la diversité des points de vue et de la complexité du monde. Elle devrait être de nature à satisfaire tous ceux qui sont attachés au bon fonctionnement de la démocratie. Au demeurant, elle est la norme dans la plupart des autres pays occidentaux. Que ce soit en Allemagne, en Italie ou en Espagne…, aucun groupe ne détient à lui seul la majorité absolue et doit nécessairement composer avec d’autres partis pour assurer une majorité gouvernementale à peu près stable. On nous dit que ce n’est pas dans la culture politique de notre pays. Ce qui est vrai. Depuis des lustres, peut-être depuis toujours, la politique se joue en France sur le mode idéologique et manichéen, bloc contre bloc, détenteurs de la vérité contre les autres (qui sous-entendu ne l’ont pas). Pas de compromis possible, on s’oppose pour s’opposer, on réagit en partisan et non en esprit libre, autonome.

            C’est précisément cela qu’il faut changer. Et c’est peut-être la chance qui s’offre aujourd’hui à notre pays, de faire de la politique autrement. Et comment cela ?

            D’abord en se persuadant qu’aucun parti, aucun groupe politique quel qu’il soit, ne détient à lui seul le monopole du cœur ou celui de la vérité ; et qu’il faut se défaire de l’idée, assez primaire et à vrai dire assez stupide, que son camp a toujours raison et que celui d’en face a forcément tort. En bref, se convaincre que le seul chemin possible, dans l’intérêt de tous, est celui du compromis.

            La recherche du compromis n’est autre que la mise en oeuvre du débat, du vrai débat, à toutes les étapes de la prise de décision. Elle se fonde sur l’échange et la confrontation permanente des idées. Chacun, à tour de rôle, expose ses arguments, lève les ambiguïtés et les malentendus, et participe, pas à pas et de plein droit, à la confection d’un accord qui même s’il ne fait pas l’unanimité, ne pourra être contesté quant à la manière dont il a été obtenu. Comme on le voit, un tout autre mode de fonctionnement que celui en vigueur sur les bancs de l’Assemblée où les groupes politiques cherchent à se neutraliser et « à faire le buzz » plutôt qu’à entrer dans un véritable dialogue constructif.

            Une telle culture de compromis, nous en sommes convaincus, est la seule méthode vraiment efficace d’aller de l’avant et de rompre avec cette idée bien ancrée chez nombre de nos concitoyens que la France n’est pas réformable et que les politiques, quel que soit le talent de celui ou celle qui les dirige, sont vouées à l’impuissance. Mais plus encore, dans le contexte de tension sociale et de crise financière que traverse aujourd’hui le pays, elle est sans nul doute le moyen le plus sûr de sortir de ce climat d’affrontements et de violences permanent, et de ce qui pourrait conduire un jour à une crise de régime ; à plus long terme, elle est le chemin à suivre pour espérer réconcilier les Français avec leurs élus et amener ceux et celles qui aujourd’hui se désintéressent de la politique et se réfugient dans l’abstention, à retrouver le chemin des urnes.

Ne soyons pas dupes : l’extrême droite reste l’extrême droite

Le moment est venu à chacun de prendre ses responsabilités.

Si grande que soit l’aversion qu’éprouvent certains d’entre vous vis-à-vis du président actuel et le souhait qu’ils ont de le voir partir soit en ne se rendant pas aux urnes ou, pire encore, en portant son bulletin pour une candidate inconnue à bien des égards et « qu’après tout on n’a jamais essayée », le moment est venu de bien mesurer les risques encourus.

Sous des oripeaux d’un programme conciliant et d’une femme aimable, souriante qui se déclare à l’écoute des Français et la seule représentante du peuple, l’Extrême droite reste l’extrême droite, c’est-à-dire un régime qui nécessairement sera amené à tourner le dos à nos valeurs les plus fondamentales et à suivre l’exemple de Poutine en Russie ou de Victor Orban en Hongrie ; autrement dit, un régime nationaliste, autoritaire, replié sur lui-même et qui nécessairement sera conduit à s’opposer à l’Europe telle qu’elle a été patiemment et durablement construite par nos aînés et qui, quoi qu’on en dise et quoiqu’on puisse en penser, nous a apporté le bien le plus précieux qui soit, la paix.

Alors chers amis, réfléchissons bien avant de déposer notre bulletin dans l’urne le 24 avril prochain. Ne soyons pas dupes, l’extrême droite reste l’extrême droite, un régime dangereux pour notre vivre ensemble !

Présidentielles : le choix entre réforme et rupture

            Même si les jeux ne sont pas encore faits, on peut d’ores et déjà dresser un bilan de ce premier tour des présidentielles 2022…
            De la campagne qui s’achève, il ressort que la gauche et la droite classiques, celles qui autrefois se relayaient au pouvoir et prétendaient, chacune à leur tour, incarner le mouvement et la volonté de réformes, ont fait faillite. A la place, ont émergé à gauche comme à droite des partis de rupture. Rupture autour de deux thèmes majeurs : la refonte des institutions de la République et une remise en cause de l’Europe telle qu’elle existe.
            Mais si ces partis de rupture présentent entre eux bien des points communs, tout au moins sur la forme (ils se disent antisystèmes et préconisent une toute autre gouvernance), ils divergent profondément sur le fond. Alors que les uns, vieil héritage du marxisme, se déclarent internationalistes et recrutent le gros de leurs troupes dans les classes moyennes de la bourgeoisie urbaine, les seconds se déclarent souverainistes et attirent plutôt les milieux populaires des villes et des campagnes.
            Subsistent ceux qui refusent cette rupture. Ils se situent au centre. Un centre qui tente de s’élargir sur ses marges, à gauche et à droite. Autrement dit, de la sociale démocratie à la droite réformiste. Ils ont en commun d’être progressistes, pragmatiques et résolument européens.
            C’est par rapport à ce nouveau centre élargi que les partis traditionnels du PS et de LR devront se positionner s’ils ne veulent pas se marginaliser un peu plus par rapport à leur électorat. Le choix entre la réforme de ce qui est (et qui n’est jamais satisfaisant) et la rupture hypothétique et aventureuse avec l’ordre ancien. Pour eux, il n’y a pas d’autre alternative.

Ukraine : une guerre absurde et inquiétante

            On ne le dira jamais assez, cette attaque russe sur l’Ukraine est d’une absurdité sans nom. Un mois qu’elle a démarré et déjà des milliers de morts, de blessés, des millions de femmes et d’enfants sur les routes à la recherche d’un pays d’accueil, plusieurs villes parmi les plus importantes, bombardées, dévastées, un pays gravement endommagé qui mettra des décennies à s’en remettre…
            Et tout ça pour quoi ? Parce qu’un homme, un président régnant sans partage sur un immense et puissant pays, détenteur de l’arme suprême, a décidé de briser les velléités émancipatrices de son proche voisin l’Ukraine avec lequel pourtant, et ce n’est pas le moindre des paradoxes, elle entretient depuis toujours des liens historiques et culturels. Une guerre fratricide en quelque sorte !
            Quelle que soit l’issue du conflit, l’Europe, dans son acception la plus large, celle qui, pour reprendre l’expression du général de Gaulle s’étend de l’Atlantique à l’Oural, en sortira plus divisée que jamais. Deux camps irréductiblement opposés se regardant en chiens de faïence comme à la pire époque de la guerre froide ! Et tout cela à cause d’un despote mal éclairé qui, se croyant investi d’une mission quasi divine, s’est mis en tête de restaurer l’ancienne Union soviétique quand la Russie considérait les diverses républiques de sa périphérie comme un prolongement naturel de sa souveraineté, son indispensable glacis face aux menaces extérieures.
            Quel gâchis se dit-on ! Surtout quand on pense que les deux blocs russe et occidental loin de s’opposer sont faits pour se compléter et s’enrichir mutuellement. D’un côté, l’immense territoire russe, (17 millions de km², plus de 30 fois la France) et ses énormes richesses (gaz, pétrole, minerais, bois, terres agricoles, etc.), mais relativement peu peuplé (146 millions d’habitants) et faiblement développé (PIB comparable à celui de l’Espagne). De l’autre, le bloc occidental d’une superficie trois fois inférieure (10 millions de km²), mais comprenant une marqueterie d’États riches et peuplés (500 millions d’habitants) incapables cependant de faire face à ses énormes besoins énergétiques et de matières premières (minerais, produits alimentaires…)
            C’est l’évidence même, l’intérêt géostratégique de la Russie tout comme celui du monde occidental est, à plus ou moins long terme, de se rabibocher et plus encore de s’allier face aux prétentions hégémoniques du mastodonte chinois lequel, avec ses 1,4 milliard d’habitants, ne peut se désintéresser des vastes espaces sibériens encore largement sous-exploités de ses confins septentrionaux.
            En attendant on se perd en conjectures. Dopés, galvanisés, exaltés par un président charismatique (véritable révélation de ce début de guerre), les Ukrainiens résistent d’une façon qui force l’admiration. Le maître du Kremlin ne s’attendait certainement pas à une telle combativité. Son projet de départ d’une guerre éclair ayant fait chou blanc, il se rabat à présent sur une stratégie moins spectaculaire en termes de résultats mais plus meurtrière et autrement plus destructrice, celle du siège et de l’étranglement progressif des principaux foyers urbains et industriels. Mais jusqu’où ira-t-il dans son effort d’anéantissement et d’escalade de la terreur ? Quelles sont ses véritables intentions ? Prendre tout le pays et le satelliser en mettant à sa tête un gouvernement fantoche  ou se contenter d’organiser la sécession des régions à majorité russophone ? L’homme est imprévisible, convaincu de sa force et de la faiblesse de ses adversaires.
            Et l’Europe dans tout cela ? Un bel élan de solidarité s’est manifesté un peu partout pour venir en aide à ce peuple en souffrance et accueillir ce flot de réfugiés affluant aux frontières. De leur côté, les chefs d’Etats occidentaux, dans une rare et belle unanimité, se sont mis d’accord pour alourdir les sanctions à l’encontre de l’Etat russe et soutenir aussi loin qu’ils le peuvent l’Ukraine et son génial président, tant sur les plans militaires que diplomatiques. Mais pas au point de leur faire franchir la ligne rouge qui les ferait passer pour des belligérants ce qui ipso facto ouvrirait la porte à un possible conflit nucléaire.
            Comme on le voit on n’est pas sortis de l’auberge !

Présidentielles : ne pas nous faire prendre des vessies pour des lanternes

            La campagne présidentielle est à présent lancée. Et comme d’habitude, chacun y va de ses promesses. Que ce soit sur les retraites, le pouvoir d’achat, les taxes, le logement, les services publics, les impôts, etc., nos candidats ont des solutions.  Avec eux aux manettes, les pauvres seront moins pauvres, les riches moins riches, les profs mieux payés, les chômeurs moins nombreux, les patrons plus conciliants, les trains seront à l’heure et la vie sera plus belle… 

            Mais l’histoire hélas nous apprend qu’une fois arrivés au pouvoir, rien ne se passe comme prévu. Des avancées sociales, il y en a bien et parfois même dans le sens que l’on souhaitait, mais jamais elles ne sont à la hauteur de ce que l’on espérait. Et sans remonter à Mathusalem, voyez ce qu’il advenu en 1981 avec Mitterrand, en 1995 avec Chirac, en 2007 avec Sarkozy, en 2012 avec Hollande. Ils voulaient « changer la vie », « réduire la fracture sociale », mieux répartir les richesses (« mon ennemi, c’est la finance » affirmait l’un d’eux)… ça n’a pas marché ou tout au moins pas aussi bien qu’eux-mêmes l’eussent souhaité. 

            Que s’est-il passé ? Pourquoi tant d’espoirs déçus et de désillusions ?  Parce que nos candidats ont une fâcheuse tendance à nous faire croire que tout ce qui serait souhaitable pour le bien-être de nos compatriotes est possiblement réalisable. Tout n’est qu’une question de volonté politique assurent-ils. Sauf qu’ils sous-estiment soit par calcul soit par ignorance, la complexité du monde, autrement dit les obstacles de toute nature auxquels ils devront faire face une fois les portes du pouvoir franchies. Et parmi ces obstacles, on le sait bien, il y a les lourdeurs administratives, le contexte international et les accords, souvent par centaine, qui nous lient à l’Europe et aux autres États de la planète. 

            Sans parler de la question, délicate entre toute, celle de notre structurel déficit budgétaire. Comment vouloir, comme certains le proclament avec assurance, augmenter le Smic, revenir à la retraite à 60 ans, passer à la semaine de 32 heures, diminuer la facture énergétique, améliorer les services publics (hôpitaux, transports, prisons, écoles, police, pompiers…), et cela bien sûr sans augmenter les impôts ? 

            Mais avec quel argent ? 

            Rien de plus simple affirment-ils. L’argent, il suffit d’aller le chercher là où il se trouve : chez ces grands patrons qui s’en foutent plein les poches, tous ces capitalistes et autres spéculateurs du Cac 40, ces fraudeurs du fisc qui cachent leur magot en Suisse ou au Luxembourg… Plusieurs dizaines de milliards en effet ! Sauf que si des progrès ont été faits  ces dernières années pour coincer  quelques-uns de ces arnaqueurs de haut vol, force est de reconnaître que ce n’est pas simple et qu’il serait bien illusoire de compter sur le recouvrement de cet argent volé ou dissimulé pour renflouer les caisses de l’État. 

            Et la dette ? Vous y pensez à la dette ?   Presque 3000 milliards d’euros, ce n’est pas rien ! Il faudra bien se mettre à la rembourser. Que nenni disent-ils ! La dette, on peut l’effacer  au moins en partie, on ne doit pas en tenir compte ! Faisons comme si elle n’existait pas. Ben voyons !

            Pour d’autres, à l’origine de notre faramineux endettement, il y a le laisser-aller, la gabegie, l’argent mal réparti, les dépenses inutiles, ces dizaines de niches fiscales … Ce qui n’est évidemment pas faux. Le remède ? Dégraisser  l’État.  Ah la belle idée ! Et comment dégraisser l’État ? En s’attaquant à la bureaucratie, au millefeuille administratif… et en premier lieu, en réduisant drastiquement le nombre de fonctionnaires. Le nombre de fonctionnaires ! Le sujet revient à chaque fois sur le tapis. Et de combien s’il vous plaît ? De 150 voire 200000 disent certains. Et dans quels secteurs s’il vous plaît ? Question embarrassante et réponse embarrassée  surtout quand ces mêmes candidats désirent voir augmenter le nombre de policiers, de professeurs, d’infirmières et de gardiens de prisons… Passons ! 

            Et puis, il y a ceux pour qui tous nos malheurs, y compris celui de notre déficit budgétaire, viennent des autres. Les autres, ce sont les étrangers, ces migrants qui de partout et par milliers s’implantent indûment sur notre sol en profitant de notre généreux système de protection sociale. Des étrangers qui nous coûtent les yeux de la tête ! Leurs solutions ? On les connaît : fermer nos frontières, arrêter le flux migratoire, renvoyer les illégaux, rester entre nous…. Et on pourrait  ainsi récupérer des dizaines de milliards qu’on redistribuerait aux Français. Pas bien joué ça ? 

            Mais outre la façon quelque peu cavalière (pour ne pas dire plus) de régler le sort de ces malheureux le plus souvent poussés à l’exil, il y a le fait que ces étrangers une fois installés, loin d’être des pique-assiettes vivant à nos crochets, exercent bien souvent un job que nos compatriotes ne veulent pas faire, qu’ils payent leurs impôts comme tout bon citoyen et  contribuent ainsi à enrichir notre pays …Ici comme ailleurs, il y a loin de la coupe aux lèvres !

            Enfin, il y a les candidats pour qui le sujet central, celui autour duquel s’organise tout leur programme, tourne autour du changement climatique et de la sauvegarde de l’environnement. Ce qu’ils veulent, c’est ni plus ni moins que revoir l’ensemble de la gouvernance de l’État : moins de dépenses et plus de sobriété dans tous les domaines, instaurer un autre mode de vie basé sur la chasse aux gaspis, le recyclage, les circuits courts. Produire moins et consommer mieux afin de nous réconcilier avec la nature et ainsi par des mesures concrètes nous mener sur la voie d’un monde plus solidaire, plus humain, plus  fraternel. 

            Tout cela est très louable et parfaitement compréhensible par nos concitoyens. Sauf qu’une telle transformation, qui implique un changement profond de nos  comportements et de nos mentalités productivistes et consuméristes, ne peut s’inscrire qu’en toile de fond de nos préoccupations immédiates (pouvoir d’achat, retraite, logement, transports, vacances…) et dans le cadre de réformes progressives, acceptables et acceptées par la majorité de nos concitoyens. Même s’il y a urgence en la matière, dans ce domaine comme tant d’autres mais surtout dans celui-ci, il y a lieu de faire preuve de pédagogie, de trouver le bon rythme, de ne pas forcer l’allure, de ne pas brutaliser les consciences au risque de se mettre tout le monde à dos.  

            Tout cela pour dire, qu’il faut se méfier des beaux parleurs, des discoureurs  qui nous promettent monts et merveilles. Qu’ils veuillent nous faire rêver ? Pourquoi pas mais pas trop. Pas au point de nous faire prendre des vessies pour des lanternes ! Même en politique, il faut savoir raison garder !

L’esprit critique plutôt que l’esprit partisan

            En cette année nouvelle qui sera celle des présidentielles et des législatives, permettez-moi de formuler un vœu, un vœu un peu fou je l’avoue : que l’on soit capable de ne plus réagir aux actualités en partisan déterminé, intransigeant, c’est-à-dire comme celui qui, encarté dans une doctrine, un système d’idées, juge et répète machinalement, sans trop réfléchir, ce qu’il a appris ou ce qu’on lui a inculqué. C’est un psittaciste qui s’ignore ! Ça peut donner un bon soldat, rarement un bon citoyen !
            Et qu’à l’opposé l’on puisse faire preuve d’esprit critique, de cette capacité à ne recevoir pour vrai que ce que l’on a minutieusement et préalablement analysé et interrogé. Autrement dit, d’être en mesure de se forger sa propre opinion, sa propre vérité, indépendamment de ce qu’on peut entendre et voir à la télé de la part de nos chers leaders, des « professionnels » de la politique.
            Le pire en effet est de tomber dans le piège manichéen et crétinisant du bien et du mal, C’est-à-dire d’être un partisan convaincu de la cause que défend son propre parti ou plutôt de ceux qui le dirigent, et parallèlement de se muer en partisan non moins convaincu de l’absolue fausseté de la cause d’en face, de ceux qui défendent l’autre ligne politique et que l’on doit combattre à tout prix et par tous les moyens.
            La politique est un art bien difficile qui devrait moins viser à vaincre l’autre camp qu’à rechercher avec lui le nécessaire et indispensable compromis, seule condition pour dégager une majorité de gouvernement.
            Mais peut-être en effet suis-je un peu fou !

Sommes-nous tombés dans l’irrationalité ?

            Irrationalité, c’est le mot qui me vient spontanément à l’esprit pour rendre compte de la situation sociale du pays en cette fin d’année 2021, de la droitisation de la vie politique, de la radicalisation des points de vue, du complotisme ambiant et de la défiance généralisée envers les élus et envers les médias, sans parler de l’émergence du phénomène Zemmour symptôme d’une société malade à la recherche d’un nouvel équilibre.

            Irrationnelle est l’attitude de tous ceux et celles, une minorité en vérité (6 millions environ) qui, en dépit de toutes les statistiques, refusent de se faire vacciner et sont ou seront demain les premières victimes de la Covid et donc les plus susceptibles de venir encombrer nos hôpitaux. Se doutent-ils que par leur comportement irresponsable ils contraignent les pouvoirs publics à maintenir des mesures coercitives (tel que le passe sanitaire) à l’encontre de la société toute entière et empêchent ou retardent un retour à la normale auquel pourtant ils aspirent ? Tout au moins je le crois et je l’espère.

            Irrationnelle aussi est l’action de ces quelques échevelées féministes qui transforment la lutte légitime et salutaire contre les violences faites aux femmes, en un combat anti-masculin outrancier et simpliste. Les mêmes qui jettent en pâture devant l’opinion publique des hommes en vue, sur simple dénonciation, des violeurs potentiels certes mais présumés innocents, avant même qu’ils aient été jugés, juste pour les disqualifier, juste pour faire le buzz comme on dit. Est-ce aux réseaux sociaux et aux médias de rendre la justice ?

            Irrationnel toujours est ce mouvement qui prône une réécriture de l’histoire et en vient à exiger le déboulonnement de certaines de nos statues : Colbert, Bugeaud, Napoléon… et même, je n’en ai pas cru mes oreilles, un Saint-Michel sur une certaine place des Sables d’Olonne…). Ou encore ceux qui appliquent, en dehors de toute règle, cette écriture inclusive qui embrouille la lecture et vient compliquer encore plus la tâche de nos jeunes écoliers. Sans parler de cette discrimination positive, à présent légalisée qui, bien qu’ayant apporté un rééquilibrage utile dans les divers recrutements entre hommes et femmes (grandes écoles, fonction publique, entreprises et autres), n’en déroge pas moins gravement aux lois universalistes et indifférentialistes de notre république !

            Et que dire de tous ceux qui utilisent des mots d’ordre délibérément agressifs et provocateurs, tels que « racisme d’État », « pensée décoloniale », « racime anti-noir », « lutte anti-blanc », « anti-viande », anti-ceci et anti-cela pour tenter d’exister en tant qu’identités distinctes et sciemment distinctes au sein de la nation française ?

            Elargissons le débat. En France, contrairement à d’autres pays, le souci du bien commun est mis en avant et a toujours servi de pivot à la morale publique. En d’autres termes, si attentive qu’elle soit au sort des minorités, la France républicaine place l’intérêt collectif avant les intérêts et les opinions personnelles. C’est sa matrice existentielle et je ne pense pas qu’il faille en changer.

            Et s’il est nécessaire et même souhaitable que la législation s’adapte aux impératifs d’un monde de plus en plus globalisé, qu’elle tienne compte de la diversité des modes de vie et de la montée en puissance des égoïsmes revendicateurs, rien ne serait plus dangereux qu’elle cède aux sirènes de ces mouvements identitaires et fasse prévaloir ces spécificités au sein de la communauté nationale. Ce serait prendre le risque d’une fracturation et d’une dissolution à terme de la nation, la porte ouverte à une sorte de relativisme culturel inconsistant et chaotique.

La vaccination : un acte citoyen et mieux encore un acte d’amour

            Encore un peu plus de 200000 manifestants ce dernier samedi contre le passe sanitaire. Ce n’est pas une vague comparable à celle qu’on a pu observer en d’autres circonstances mais ce n’est pas non plus négligeable au point de s’en désintéresser.
            Qui sont-ils ces protestataires, ces chicaneurs et chicaneuses du samedi après-midi ? A vrai dire, un curieux conglomérat d’extrémistes de gauche, de droite, de politiciens en quête de notoriété, de libertaires, complotistes, anti ceci et anti cela qui prennent prétexte de tout et n’importe quoi pour s’opposer au gouvernement et plus directement au président de la république.
            Et puis, il y a les autres, ceux qui éprouvent une réelle inquiétude devant la tournure des événements, un sentiment diffus de peur, de défiance envers le corps médical et envers un gouvernement qui ne peut faire mieux que de naviguer à vue.
            La pomme de discorde, c’est évidemment l’introduction du passe sanitaire dorénavant nécessaire pour satisfaire ses envies d’aller et voyager comme au bon vieux temps quand on ne parlait ni de pandémie, ni de masque, ni de quoique ce soit.
            Pour les récalcitrants, il y aura toujours la possibilité de présenter un test PCR négatif à la place du QR code à l’entrée d’un restaurant ou d’un cinéma. L’alternative existe donc. Il n’empêche que ce passe est perçu comme une contrainte inacceptable, une atteinte à la liberté, un pas de plus vers l’arbitraire et l’autoritarisme du pouvoir.
            Que le passe sanitaire constitue une ingérence dans la vie privée de chacun d’entre nous est une évidence. Qu’il ait été mis en place pour inciter les hésitants et les oublieux à se faire vacciner est une autre évidence.
            Et alors ai-je envie de dire ? Faut-il s’en offusquer ? N’y a-t-il pas un principe supérieur à la liberté individuelle, « du moi je » constamment invoqué par les opposants, celui du bien commun, des devoirs des uns envers les autres et envers la communauté humaine ? Ne sommes-nous pas tous embarqués sur le même bateau ?
            Il faut le redire avec force, se faire vacciner n’est pas faire allégeance à quelque gouvernement ou président que ce soit, c’est tout simplement un acte citoyen et mieux encore un acte d’amour comme vient de le dire le pape François.

Bilan des élections : repli sur des valeurs sûres

            On a beaucoup insisté sur l’importance du taux d’abstention de ces élections, un taux anormalement élevé il faut en convenir. Mais dans le contexte particulier que nous vivons depuis plus d’un an, faut-il s’en étonner jusqu’à s’en offusquer comme l’ont fait certains leaders politiques après le premier tour ? Je ne le crois pas.
            Les dates choisies des deux scrutins régionaux et départementaux, leur concomitance, la fin du confinement et le désir d’évasion, le beau temps, sont autant de raisons qui peuvent expliquer ce désintérêt notamment chez les jeunes qui, plus que d’autres, ont été affectés par cette longue période d’isolement forcé et de repli sur soi.
            Mais de toute évidence, il n’y a que cela. Il y a plus que cela. Ce désintérêt, ou plutôt cette indifférence, vient aussi d’un double scrutin dont on n’a jamais bien vu les enjeux, d’autant que les médias ont mis l’accent, à tort me semble-t-il, sur les élections régionales plutôt que sur les départementales.
            Or, l’échelon départemental demeure, quoi qu’on en dise, le plus pertinent aux yeux de nos concitoyens. Non seulement parce qu’il est ancré dans la mémoire collective mais aussi parce qu’il se situe à la bonne échelle, celle de la proximité. Et dans l’hypothèse d’une réforme des institutions (ce fameux millefeuille administratif que tout le monde veut simplifier), je pense que c’est celui-ci qui devrait être mis en avant et plus encore, celui dont il faudrait renforcer les compétences.
            A côté, les régions, telles qu’elles ont été redessinées en 2016, manquent singulièrement de consistance à la fois géographique et historique. Malgré les efforts de nos gouvernants, elles ne parlent toujours pas aux Français. C’est vrai en particulier de la Nouvelle Aquitaine. Quoi de commun entre Guéret, Saint-Jean-de-Luz et Poitiers ? Entre les problèmes liés à la désertification de la Creuse et le trop-plein saisonnier de la côte basque ? Et pourquoi avoir séparé le littoral vendéen de son arrière-pays naturel le Poitou ? Et on pourrait citer d’autres exemples !
            Un jour ou l’autre, il faudra bien se décider à revoir la carte de ces régions en prenant appui sur les zones d’attraction de la quinzaine de villes métropoles tout en respectant et mettant à part les entités particulières que sont l’Alsace, le Pays basque, la Bretagne, la Corse…
            Aussi, dans le contexte si particulier dans lequel se sont déroulées ces élections, les résultats présentent une certaine logique. Elles manifestent le repli sur des valeurs sûres, celles des sortants issus des partis traditionnels, de ceux que les médias ont privilégiés et qui ont l’expérience du terrain ; et au contraire la crainte de l’électorat de se tourner vers les partis, tel ceux du RN ou de LREM dont on connaît peu ou pas du tout les représentants et qui n’ont guère eu l’occasion de démontrer leurs qualités gestionnaires.
            Pas de vote sanction donc mais dans le climat actuel, le peu d’envie des Français de prendre des risques, révélateur d’une certaine prudence et d’un conservatisme ambiant !